Chapitre 8
Léo put découvrir deux autres concurrentes : Alison et Chiara. Pendant qu’il regardait la seconde, Amalia le quitta et revint habillée, mais de manière à conserver toute son attention. Elle avait mis une jupe de gaze noire fixée par une ceinture dorée et un soutien-gorge de même couleur. Bien que cette jupe fût longue, le tissu était trop fin pour cacher ses jambes. Léo pouvait même continuer à reluquer ses fesses et son entrecuisse.
« Vous ressemblez à une danseuse orientale en plus érotique, opina-t-il.
— Il me manque les bijoux.
— Vous êtes déjà très belle comme ça. Mais vous avez quel âge ? Si ce n’est pas indiscret…
— Il n’existe plus de secret à notre époque. J’ai trente-cinq ans.
— Moi, j’en ai vingt et un. Vous êtes une amatrice de jeunes hommes ?
— Une amatrice d’hommes de tous âges.
— Comment avez-vous été recrutée ?
— J’ai simplement déposé ma candidature. »
On savait seulement que les hôtes et les hôtesses étaient renouvelés à chaque jeu. Les téléspectateurs ne s’intéressaient pas à eux, malgré les belles scènes de sexe qu’ils leur offraient.
Puisque son hôtesse était habillée, Léo décida de quitter sa chambre vêtu d’un slip de bain. Des couloirs les conduisirent dans une immense salle meublée de fauteuils et de canapés, située au même étage. Amalia la présenta comme un salon. Il était pour le moment mal éclairé, ses murs étant gris sombres et la lumière n’entrant que par des baies situées tout au fond. Amalia se dirigea vers elles et s’arrêta devant des canapés occupés par deux couples.
« Léo, je te présente Erwan et Rémi, déclara Amalia en désignant deux garçons habillés comme lui. Leurs hôtesses s’appellent Précilia et Katia. »
Les deux garçons se levèrent pour serrer la main de Léo. Erwan, un grand gaillard aux cheveux clairs et aux yeux bleus limpides, affichait un air joyeux et ouvert qui plut à Léo.
« Bienvenue au paradis ! » fit-il.
Léo ne sut que répondre et Erwan devina pourquoi.
« Ton hôtesse ne t’a pas parlé de ce qui t’attend en bas ?
— Si, bien sûr.
— Alors pourquoi est-ce que tu fais cette tête ?
— Pour rien… Je…
— Ça s’arrangera quand tu seras avec les filles, crois-moi.
— Pourquoi est-ce que tu dis ça ? Tu as déjà participé au jeu ?
— Non, mais je l’ai vu à la télé.
— Erwan a raison, intervint une femme aux cheveux noirs, assise les jambes croisées. Votre angoisse va très vite s’envoler. »
C’était Katia, l’hôtesse de Rémi.
Elle portait une superbe tunique blanche semée de fleurs roses et ornée de dentelles, nouée sur le ventre, qui cachait tout juste les seins mais lui laissait les jambes et le sexe à l’air libre. Ses longs cheveux châtains tombaient en boucles sur sa poitrine. Dans l’esprit des téléspectateurs, les vêtements aguicheurs des hôtesses étaient souvent éclipsés par la nudité intégrale des participantes, mais Léo y était sensible.
« Allons-y », dit Amalia.
Léo échangea quelques mots avec Rémi, qui était un garçon plus posé qu’Erwan, puis il suivit sa compagne.
Amalia se dirigea vers un balcon accroché à la façade méridionale du bâtiment Eumédia où elle fut éblouie de lumière. Plusieurs piscines serpentaient en contrebas, communiquant par des cascades. Des palmiers et diverses autres plantes étaient dispersés entre elles. Cette aire recouverte de gazon se poursuivait plus loin par une prairie et une forêt dont les feuilles luisaient comme des paillettes sous le soleil.
« C’est superbe ! s’exclama Léo.
— Erwan n’avait pas tort en disant que vous êtes au paradis, répondit Amalia. Profitez des journées que vous allez passer et ne vous tracassez pas trop pour la suite. Le plaisir que vous avez vu sur les visages des participants aux derniers jeux est bien réel. Ici, on ne fait pas de simulation. »
Amalia tendit son bras vers un corps dénudé allongé au bord d’une piscine. Son chaperon, en slip de bain, était assis non loin d’elle.
« C’est Maylis, dit-elle à Léo. Je vous ai également montré Alison et Chiara. Elles sont ici. »
Léo se pencha au-dessus de la balustrade.
« Les autres sont Loubna, Estelle, Agathe, Rachel et Alexia. Il manque deux filles. Les trois garçons présents sont Martin, Habib et Jordan. Nous allons les rejoindre et les choses sérieuses vont commencer. Les rapports sexuels que vous aurez seront filmés et les images seront diffusées ce soir. Efforcez-vous donc de plaire au public. Attendez-vous à ce que les filles soient plus que consentantes, puisque dans la première partie, c’est surtout elles qui reçoivent les dons.
— Je ferai le nécessaire, promit Erwan.
— Mais faites attention à ne pas arriver complètement épuisés à la chasse.
— Pas de problème pour moi, se vanta Erwan. Je peux sauter dix filles en une journée. »
Katia lui donna un regard de travers.
« D’abord, prenez un moment pour faire connaissance, dit-elle. C’est important. N’oubliez pas de tenir compte des vœux du public. À partir de ce soir, les dons conditionnels vous encourageront à coucher avec certaines filles. Si vous ne faites pas ce que les gens souhaitent, vous risquez d’y perdre, mais vous devez aussi tenir compte de vos affinités.
— Comme dans la vie, il y a des filles qu’on a envie d’aimer et d’autres qu’on déteste assez vite, précisa Amalia.
— C’est vrai que j’ai envie de trucider mon ex, déclara immédiatement Erwan.
— Pourquoi tu ne l’as pas invitée à venir ici ? questionna Rémi.
— Je le lui ai proposé mais elle n’a pas voulu », geignit Erwan.
Les trois garçons et leurs accompagnatrices se parlaient alignés contre la balustrade, le regard tourné vers les sept filles.
« Allons, je n’étais pas sérieux ! se justifia Erwan.
— Mais on vous demandera réellement de commettre un meurtre, répondit Katia. Si vous avez des problèmes de conscience, essayez de tuer une fille que vous n’aimez pas. Sinon, attaquez-vous à celle que vous trouvez la plus belle et tenez également compte des suggestions du public. Les dons conditionnels comptent beaucoup. »
Elle était vêtue de manière aussi provocante que ses collègues, avec une robe dissymétrique qui laissait son corps à découvert sur le côté gauche. Rémi s’y était placé afin de lui caresser la fesse. Comme ses collègues, elle marchait pieds nus sur le sol dallé.
Elle s’éloigna de la balustrade, suivie par ses consœurs, puis par les trois garçons.
Avec les moyens dont elle disposait, la société Eumedia pouvait s’offrir les plus belles femmes du monde, ainsi que les plus beaux bâtiments. Celui-ci était un véritable palais. Pourtant, il était rempli de salles vides et les responsables de l’émission ne se montraient jamais. On savait très peu de choses sur la personnalité de Walter Nemeth, à part son goût immodéré des femmes, qu’il affichait sans aucun complexe.
Il avait commencé dans la pornographie, une trentaine d’années auparavant, en tournant des films qui avaient été remarqués pour leur qualité. Nul ne doutait qu’il aimait la beauté sous toutes ses formes ! Puis il s’était tourné vers l’horreur et le gore, en profitant de la permissivité qui régnait alors. Il avait tout de même réussi à choquer, moins à cause des femmes coupées en morceaux que de la promotion de toutes les perversions sexuelles, dont l’inceste. Il expliquait que ce n’était que du cinéma jusqu’au jour où il était entré dans la réalité avec le Jeu du sexe et de la mort. Comme tous les garçons présents, Léo avait regardé beaucoup de ses films. Plus ils étaient sanguinolents et plus il les appréciait.
Nemeth arrivait à balayer toutes les accusations de sexisme ou de phallocratie, à cette époque où l’égalité des sexes était rentrée dans les mœurs, car il avait toujours été correct et très généreux avec ses collaboratrices. On ne comptait plus les femmes qui avaient fait fortune grâce à lui et l’adoraient.
Cependant, personne ne savait vraiment qui il était. Juste un homme d’affaires habile et dénué de scrupules ? Ou un véritable obsédé sexuel ? Était-il vraiment doté d’une forme de générosité ?
« Nous sommes filmés ? demanda Léo.
— Oui, répondit Amalia. À partir de maintenant, le centre de contrôle nous surveille.
— Je suppose que sa visite n’est pas au programme.
— Il n’y a pas grand-chose à voir. Tout est informatisé, si bien que seule une poignée de personnes y travaillent. La maîtresse des lieux, c’est Andrea.
— Il n’y a pas de contrôle humain ? fit Erwan. Et donc pas d’homme occupé à se branler devant les images des filles ?
— Le personnel est majoritairement féminin », répondit Précilia en lui faisant un clin d’œil.